Oui ! si et seulement si l’atteinte à la vie privée des salariés est proportionné aux intérêts en jeu.
Le 4 octobre 2023, la Cour de cassation a statué sur la validité de licenciement pour faute grave dans la fonction publique hospitalière.
L’hôpital reprochait à deux infirmières d’avoir participé à une séance photos en maillot de bain sur leur lieu de travail et pendant leurs horaires de travail. Elles ont été licenciées pour faute grave.
Les photographies avaient été échangées sur leur groupe de discussion privé « messenger ».
Les salariées ont contesté leur licenciement pour faute grave.
Elles soutenaient que la production de ces photographies émanant d’un groupe privé portait atteinte à leur vie privée et n’était pas indispensable à l’exercice du droit de la preuve par l’employeur.
Quelle est la règle légale en matière de preuve pour l’employeur ?
Les articles 6 et 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme garantissent le droit à un procès équitable et le droit au respect de la vie privée et familiale.
La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) consacre l’équilibre entre la protection de la vie privée et d’autres intérêts en jeu.
Alors ?
L’employeur pouvait il utiliser ces photographies postées sur un groupe de discussion privé pour licencier les salariés ?
Oui.
La Cour de cassation a rappelé que l’illicéité d’un moyen de preuve n’entraîne pas nécessairement son rejet des débats devant la Cour.
Le juge doit évaluer si l’utilisation de cette preuve porte atteinte au caractère équitable de la procédure dans son ensemble.
Pour ce faire, il doit mettre en balance le droit au respect de la vie personnelle du salarié et le droit à la preuve.
Ainsi, le droit à la preuve peut justifier la production d’éléments portant atteinte à la vie personnelle d’un salarié à condition :
- que cette production soit indispensable à l’exercice de ce droit
- et que l’atteinte soit strictement proportionnée au but poursuivi.
Vigilance sur vos publications ! y compris en privé…
Madame Annicette Gballou, Stagiaire (Licence 3 Université Paris Nanterre X) & Mme Laetitia LINOSSIER, Avocat en droit du travail