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Peut on publier partiellement un bulletin de salaire dans un tract syndical ?

Le bulletin de salaire est il un élément de la vie privée du salarié ? Peut-il être publié dans un tract syndical ?

Le contenu des tracts syndicaux est strictement encadré.

Larticle L. 2142-5 du Code du travail rappelle que le contenu d’un tract syndical doit respecter les dispositions de la loi sur la presse du 29 juillet 1881 et ne peut contenir aucune diffamation, injure, fausse nouvelle ou provocation.

Le tract syndical doit également respecter la vie privée des salariés en application de l’article 9 du Code Civil.  

Alors : un bulletin de salaire est-il un élément de la vie privée du salarié ? peut-il être publié dans un tract syndical ?

Dans une affaire jugée par la Cour de cassation récemment, un tract syndical indiquait « notre délégué syndical CFDT a ainsi vu sa rémunération mensuelle brute progresser de 84,42% en 9 ans ! ».

Ce tract contenait également un extrait des bulletins de salaire d’un salarié clairement identifiable.

La Cour d’appel a considéré que la publication partielle des bulletins de salaires, sans l’accord du salarié, portait atteinte à sa vie privée.

En effet, un bulletin de paie relève de la vie privée du salarié car il comporte son âge, son adresse personnelle, sa domiciliation bancaire, la mention d’un éventuel arrêt de travail et, évidemment, le montant de son salaire.

Le bulletin de salaire est un élément de la vie privée du salarié.
Il ne peut être publié dans un tract syndical.

Néanmoins, la Cour d’appel a jugé que le salarié ne démontrait pas que la communication de sa rémunération portait atteinte à sa réputation, sa carrière ou encore son image dans l’entreprise. Elle n’a donc pas octroyé de dommages intérêts au salarié.

La Cour de cassation n’a pas suivi ce raisonnement.

La Cour de cassation a rappelé que la seule constatation de l’atteinte à la vie privée ouvre droit au paiement de dommages intérêts.

Ainsi, la publication, même partielle, d’un bulletin de salaire caractérise une atteinte à la vie privée et ouvre automatiquement droit au paiement de dommages intérêts au salarié concerné (Ccass. soc, 20 mars 2024, n°22-19.153).  

Maître Laetitia LINOSSIER, Avocat en droit du travail & Madame Rime LAOUFI, stagiaire.